LE TEMPS EST ÉLASTIQUE ET DÉGOULINANT EN FRANCE

Le temps français est comparable à une montre molle des tableaux de  Dali. Cela me fait également penser à la chanson des Frères Jacques :  la  confiture, ça dégouline … En effet, quand quelqu’un prend rendez-vous en  France, cela peut dégouliner. Notre temps est mou, malléable. Il faudra  compter parfois sur une heure de retard sans que vous en soyez averti.  C’est ainsi et personne ne semble s’en préoccuper. La volonté est de rester dans le flou le plus total. Peu importe les autres engagements fixés dans la journée. L’autre possède votre temps dans un « tout » fusionnel. Notre temps en France est constamment pris en otage par autrui.


Cela permet une collusion collective.  Lors d’un déjeuner, les Américains s’attendent à ce qu’à la dernière  bouchée avalée, l’assiette leur soit systématiquement soustraite. Il n’y a  aucune seconde de perdue et l’anticipation sur la sortie du restaurant est  déjà mentalement intégrée. C’est insupportable pour un Français qui  encourage la dilatation du temps, et ne peut souffrir une telle  interruption dans le flot de paroles, qui peut lors d’un repas, dégouliner et s’étirer sur des heures. La conversation donnant la cadence au bon  déroulement du repas ne permet pas une irruption extérieure venant  troubler le tissage du cocon de la discussion en cours. C’est un flux  onctueux au cours duquel les mots et les mets fusionnent. Alors qu’un  Américain est déjà dans l’action suivante :  next !  Il ne peut faire qu’une  chose à la fois et segmente ses actions : manger est séparé de la  conversation et de la conduite des affaires, etc.